Témoignage d’une collaboration internationale : mobilité Erasmus+ MELYPROLOR France – Québec – LéA-IFÉ PRO +
Dans le cadre du LéA-IFÉ Écrire, dire pour s’approprier son métier [PRO+] nous nous étions promis d’ouvrir notre recherche à l’international. C’est chose faite. Julian, qui a ouvert la voie, en témoigne.

Je suis parti au printemps dernier à Chicoutimi. Enseignant en maintenance des véhicules au lycée des métiers de Dombasles-sur-Meurthe, j’ai effectué cette mobilité avec M. Benoit MANGEL, proviseur adjoint de mon établissement. Cela m’a permis de tisser un lien entre notre LéA, notre partenaire de l’Université au Québec à Chicoutimi, Sandra Coulombe et le lycée.

Rencontre professionnelle
Ainsi, j’ai rencontré des personnes à qui j’ai posé des questions qui soutiennent cette mise en lien :
Domaine d’intérêt |
Questions |
Métiers de l’automobile |
Comment recrutez-vous vos nouveaux collaborateurs ? De quelles origines sont les travaux qui occupent la majorité des interventions de vos ateliers. Quelle est la périodicité des entretiens des véhicules de votre région ? |
Formation professionnelle |
Quelles sont vos relations avec les centres de formations locaux ? Comment se déroule une formation de maintenance des véhicules dans votre pays ? Quelle est la durée d’une formation en maintenance des véhicules dans votre pays ? Avez-vous un bon souvenir de vos études professionnelles ? |
Pratiques d’écritures |
L’écriture a-t-elle une place importante dans votre métier ? |
J’ai rencontré un professionnel sur son lieu de travail : M. Antony BUGEAUD, vendeur automobile chez FORD PERRON à Chicoutimi. Français installé au Canada depuis 6 ans. Il a fait ses études à Chicoutimi dans la maintenance automobile. Il m’explique que le Québec est à la recherche de nouveaux collaborateurs dans le milieu automobile et dans tous les secteurs (atelier, magasin, vente). Sa formation professionnelle s’est déroulée sur 1 800 heures et exclusivement en atelier, dont 2 mois en entreprise. Il a dû s’équiper sérieusement. Précisons que les fournitures et le matériel (coffres et outillages) sont à la charge des personnels (fournisseur Snap-on).

Les formations DEP (BAC PRO en France) se déroulent sur 18 mois au Centre de formation professionnelle (CFP) Grand Fjord.
Pour évoluer au sein de l’entreprise, il faut passer des tests, pour valider des compétences niveau A,B,C … en fonction des connaissances et des savoir-faire.
Les interventions en ateliers sont de tous genres, mais les véhicules sont généralement récents (remplacement tous les 4 ans en moyenne).
Il n’y a pas de contrôle technique obligatoire au Québec. On croise donc des véhicules en très mauvais état. La clientèle de cette entreprise est plutôt modeste et remplace ses véhicules en moyenne tous les 4 ans. Les bons mois, il se vend environ 25 pick-up. C’est le type de véhicule le plus vendu dans cette concession.
Il en existe de multiples modèles plus ou moins imposants. La population a besoin de plateau de chargement imposant pour transporter du matériel, des véhicules (quad, motoneiges, fendeuse …) pour travailler durant l’ensemble des saisons.
L’hiver étant très rude, la mécanique est durement sollicitée. Le sel utilisé sur les routes oxyde considérablement les véhicules. Il faut très souvent utiliser des chalumeaux de chauffe ou découpeur pour démonter et remplacer des pièces comme les triangles de suspension, les échappements… Les québécois ont des véhicules équipés d’un chauffe-moteur qu’ils branchent les soirs, lorsque les véhicules sont dehors. C’est une prise de courant qui dépasse à l’avant du véhicule, le client le branche et alimente une sorte de radiateur électrique.

Les entretiens ont généralement lieu tous les ans. Les professionnels profitent de l’occasion pour attirer une attention particulière au contrôle de la batterie de démarrage et à la corrosion sous le véhicule.
Lors d’un levage, il n’est pas rare que la cabine d’un pick-up se détache du châssis, ou que les bras d’un pont élévateur traversent le véhicule.
Le constructeur développe les véhicules électriques à l’image du F150 Lightning, qui se vend très bien, un pick-up de prêt de 4 tonnes et 750 km d’autonomie avec une technologie à bord impressionnante, s’appuyant sur les besoins et le mode de vie québécois.

La vente de pick-up occupe une grande majorité de l’activité vente de cette concession, mais les secteurs des berlines et des voitures sportives sont très actifs.
La population québécoise est plutôt axé sur des véhicules neufs en leasing, sans option d’achat. Encore une fois, seuls des occasions très récentes sont rachetées et revendues dans cette concession. L’utilisation intensive et le sel, ne permettent pas au concessionnaire de garantir un véhicule de qualité en « occasion récente », ils sont donc revendus à d’autres entreprises intéressées par ce type de véhicule.
Rencontres scientifiques
Présentation de l’université UCAQ

Nous avons eu la chance de visiter l’université UCAQ de Chicoutimi, découvrir les acteurs universitaires et nos collaborateurs dans les différents dispositifs comme le LéA [PRO +], Sandra COLOMBE souhaite suivre nos recherches et nos productions dans l’accompagnement à l’écriture à destination de nos élèves de BAC PRO.

J’ai aussi eu la chance d’assister à une soutenance de thèse centrée sur la formation professionnelle et le tutorat. Elle est intitulée « Portrait de pratiques de personnes superviseures universitaires en enseignement professionnel dans un dispositif de formation hybride ».
La thématique m’a beaucoup intéressé. Le propos fait écho à une situation d’enseignement de nos enseignants stagiaires. Il y est question de la collaboration entre un tuteur établissement et un autre universitaire pour accompagner au mieux ces nouveaux arrivants, dans le monde de la pédagogie et de la didactique. Certains points évoqués pourraient être intéressants à utiliser lorsque les enseignants sont éloignés les uns des autres … et pour celles et ceux qui ont des difficultés à trouver des créneaux horaires pour travailler et collaborer.
Rencontre des acteurs et actrices de la formation professionnelle au Centre de Formation Professionnelle ALMA
La directrice du centre de formation, nous présente les lieux et l’équipe. Chacun et chacune est destiné par son prénom seul, cela tranche avec nos pratiques françaises.
- Nadine : directrice du CFP ALMA
- Nabila : Responsable des mobilités internationale et orthopédagogue
- Agnès : Conseillère pédagogique
- Edgar : Tuteur et accompagnateur des élèves internationaux : recherche de logements, de travail étude. Il accompagne les élèves dans la gestion de leurs finances, de leurs voyages car la formation est ouverte à l’international. Il cherche les hébergements dans des familles d’accueil et les conduit pour tous leurs déplacements pour les démarches administratives nécessaires à leurs mobilités.
Visite des lieux de formation
Nous avons visité des plateaux techniques … Il y a du lien avec les entreprises qui font des dons et qui ont monté des structures semblables à ce qui se fait sur le terrain et les chantiers d’aujourd’hui.
Les enseignants ont 18 heures par semaine devant élèves et 35 heures obligatoires de présence dans l’établissement. Le bureau des enseignants de ce plateau technique est un lieu dédié à leurs travaux en collaboration.

Du côté des élèves…
Les élèves sont encadrés par le conseiller en pédagogie en charge de l’harmonisation des pratiques et de l’organisation des formations sur les plateaux techniques.

Le plateau soudage et assemblage
Les compétences sont évaluées sur un nombre d’heures bien identifiées, sur un référentiel de compétences. La validation de l’ensemble des compétences est obligatoire, pour l’acquisition du DEC (diplôme d’études collégiales), le suivi est à la charge de l’ensemble de l’équipe pédagogique, qui se partage l’évaluation des compétences durant toute la durée de leur formation. Il y a un conseiller pédagogue par filière.

Les compétences et le suivi des acquisitions sont affichées dans l’atelier à la vue de chacun, l’enseignant passe alors de poste en poste et valide les compétences du module au fur et à mesure des réalisations des élèves.
Les élèves ont 1800 heures de pratique, sur 18 mois. Il n’y a pas de cours de matières générales dont les contenus sont inclus dans la validation des compétences professionnelles. On utilise les mathématiques et le français… nécessaire pour valider les compétences professionnelles.


L’atelier est équipé d’une découpeuse à plasma, permettant de réaliser des objets confectionnés à destination de l’établissement et de clients. En voici des exemples :

Les règles de maintien en état de l’atelier sont affichées dans l’atelier à la vue de chacun :

Aperçu des différents champs professionnels de formation

Les compétences en cours d’acquisition sont affichées au tableau avec les compétences déjà validées, et celles à voir.
La salle de cours est assez vaste, avec l’ensemble du matériel que l’on peut retrouver dans une ferme. L’enseignante et ses élèves disposent même de moteurs 4 temps pour apprendre à dépanner des petits équipements agricoles.
- Section esthétique, coiffure
Là encore, un poste complet est mis à disposition, avec tout le matériel nécessaire pour chacun des élèves.

- Section usinage
Les élèves ont un certain nombre d’objets à confectionner durant leur formation. Le suivi des compétences est individualisé, dans un casier nominatif et évalué par les enseignants au fur et à mesure.

La section a également son propre magasin dédié à son activité.
Voici des exemple d’objets confectionnés par les élèves : à gauche, un étau; à droite, une tour de jeu d’échecs.

Présentation des possibilités d’intégration d’élève à l’international
Durant la visite, Nabila nous présente les possibilités qui s’offrent aux élèves internationaux : accompagnement sur les démarches administratives, le voyage, la recherche de logements, de famille d’accueil, d’emplois étudiant. Edgar a la charge de cet accompagnement si besoin, il va même chercher les étudiants à l’aéroport de Montréal. Ces démarches administratives sont lourdes et peuvent vite décourager de nombreux élèves, ce soutien est indispensable, il est également important de souligner, que pour venir étudier au Canada, le gouvernement demande un capital financier de 14 000 euros. Souvent les étudiants doivent faire un prêt ou demander un accompagnement financier auprès de leurs familles. Pour subvenir à leurs besoins, il est indispensable d’avoir un apport financier de 800 dollars Canadien par mois.
Zoom sur la visite du CFP du Grand Fjord à CHICOUTIMI, en section Mécanique Automobile
Enseignant en mécanique automobile, je ne résiste pas à mon souhait de détailler ce moment de ma mobilité. C’est ainsi en recherche collaborative : tout le monde contribue à la recherche commune et chacun en profite pour creuser son propre sillon.
M. Pierre Luc DUFOUR, directeur de CFP Grand Fjord, nous présente son équipe, la répartition des tâches entre les enseignants, la répartition horaire des compétences pour les élèves et les référentiels de compétences.

- Le pôle mécanique véhicules légers (parcs et jardins, motos, scooters…) :
Sur ce plateau, nous retrouvons : moto, quad, buggy, petit bateau, jet ski, scooter, motoneige et matériel de parcs et jardins.
Avant les périodes en entreprise, en fin de période, les élèves passent les deux dernières semaines sur les supports en lien avec les activités des entreprises d’accueil.
Un enseignant a entre 18 et 20 heures devant ses élèves, mais il est présent 35 heures sur l’établissement pour construire les séquences pédagogiques avec l’ensemble de l’équipe du pôle (mise à disposition d’un bureau collectif pour travailler sur place : réalisation de corrections, modification de plateau technique …). Ils sont accompagnés par le conseiller pédagogue.


- Présentation du pôle poids lourd
Le pôle poids lourd est impressionnant, les véhicules sont nombreux, avec des zones dédiées au démontage de boites de vitesses et moteurs comme le montrent ces photographies :

4. Le pôle carrosserie et peinture
Toujours dans la continuité de l’idée d’offrir à chaque élève les mêmes chances de réussite, les postes de travail sont multipliés par le nombre d’élèves (10 postes de réparation plastic, 10 coffres, 10 postes de soudure … pour 10 élèves). Un poste complet par élève permet à chacun de valider l’ensemble des compétences de validation du diplôme.

Pour conclure…
J’ai eu le grand plaisir de constater l’enthousiasme de nos homologues, qu’ils travaillent en entreprise, en laboratoire scientifique ou encore en centre de formation sur des postes d’enseignement ou de responsabilité administrative. Toutes les personnes que j’ai rencontrées ont eu un plaisir manifeste à partager leurs pratiques et leurs conceptions de la formation professionnelle.
L’ouverture internationale élargit les perspectives de notre LéA. Elle nous permet de poser un regard réflexif sur notre objet, grâce au contact des différents métiers rencontrés. L’expression « Lieux d’éducation associés » prend tout son sens : d’une part, ce voyage n’aurait pas pu se réaliser sans le soutien fort du lycée et de l’académie (financement ERASMUS+ MELYPROLOR) et d’autre part, le LéA a permis à l’établissement d’élargir son réseau de lieux de formation.
Cette expérience montre que, dans notre LéA, chacun fait vivre le projet commun (mieux accompagner les élèves dans leur formations académique et professionnelle) tout en développant ses propres centres d’intérêt professionnel.
Voilà un bel encouragement à développer nos pratiques de recherche collaborative et les rencontres internationales pour continuer à déplacer les regards et développer nos représentations respectives.

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OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
jmanneville (9 décembre 2024). Témoignage d’une collaboration internationale : mobilité Erasmus+ MELYPROLOR France – Québec – LéA-IFÉ PRO +. LE BLOG DU RÉSEAU DES LéA-IFÉ. Consulté le 18 mai 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/12wow